- Extrait -

[…]
Papa est sorti après Laval, direction Fougère.
Comme finalement, j'en avais marre de faire la tête, j'ai dit :
- Elle fait pas un drôle de bruit, ta voiture ?
- Si. Mais ce n'est pas nouveau !
C'était un break d'occasion sous le capot duquel mon père passait de plus en plus de dimanches tellement son moteur devenait capricieux.
- Pour l'instant, a poursuivi papa, elle tient le coup. Enfin… je croise les doigts !
Joignant le geste à la parole, il a lâché le volant et croisé ses doigts devant lui pour se porter bonheur. Aussitôt, la voiture a eu une série de hoquets et son moteur s'est arrêté tout seul dans un dernier
soubresaut. Les sourcils froncés, mon père a tourné le volant pour se ranger en roues libres sur le bas-côté. On est restés un instant sans rien dire alors qu'une odeur de caoutchouc brûlé commençait à nous chatouiller les narines. Trente secondes plus tard, et une épaisse fumée grise s'échappait du capot.

- Ça a l'air sérieux ! a déclaré mon père en sortant la tête du moteur.
- Tu peux réparer ?
- J'en sais rien. J'ai une lampe de poche dans le coffre, j'y verrai plus clair.
Je suis resté devant la voiture en attendant. Je n'y connaissais rien du tout en mécanique, mais à voir l'état du moteur, il était évident qu'il y avait un sérieux problème. Surtout que mon père était du genre maladroit qui se croit bricoleur !
- J'ai claqué le coffre ! m'a dit papa en revenant de l'arrière. Les clés sont sur la plage arrière. Tu peux les récupérer par l'intérieur ?
Armé de sa lampe de poche, mon père s'est replongé dans le moteur alors que je me dirigeais vers la portière arrière pour récupérer les clés. Elle était verrouillée et j'ai essayé par l'avant. Fermé aussi. Avec un fort pressentiment, j'ai fait le tour de la voiture.
- Heu… Papa ! j'ai appelé un instant après.
- Oui ?
- Comment on fait quand la voiture est fermée avec les clés à l'intérieur ?
- Quoi !!
Par réflexe, mon père avait actionné le verrouillage centralisé des portières, et nous étions enfermés dehors.
- Bon. Pas d'panique ! a dit mon père. On va appeler quelqu'un. T'as ton portable ?
- Oui. Dans mon sac… à l'intérieur de la voiture.
Mon père a soupiré, prenant sur lui pour ne pas s'énerver devant moi. On s'est regardés puis, ensemble, on a jeté un coup d'œil alentours pour voir où nous pourrions trouver de l'aide. Il n'y avait rien que des champs à perte de vue.
C'est alors que l'orage a éclaté.


Reproduit avec l'aimable autorisation des éditions Thierry Magnier
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